Ténébreuse Retraite

 

"Ah, Serceor, mon ami, je suis heureux que tu sois ici, avec moi, par cette froide nuit d’hiver. Mes vieux os ne supportent que de plus en plus mal les froidures de ces bois et personne d’autre que toi n’accepte de m’écouter. La jeunesse est aveugle aux dangers qui la guette. Ils me prennent tous pour un vieux fou. Azaël les aurait-il tous frappé de démence pour qu’ils refusent d’entendre les voix de la sagesse! Comment peuvent-ils croire que la Sirline, si proche reste étrangère à ses sombres et anciens rêves? Elle est plus vieille que nous, Serceor. Plus vieille que moi. Plus vieille que l’homme!

La Sirline à toujours été là et Elle n’oubliera jamais combien l’homme l’a blessé. Combien Elle était grande avant que nos haches irréfléchies et impudentes viennent faire de larges coupes dans ses bois millénaires. Combien nous l’avons frappé sans lui témoigner le respect infini qui lui est du, elle qui était déjà là lorsque les anciens de nos aïeuls contaient déjà la même histoire. Combien elle s’est montrée aimable de ne pas chercher plus avant sa revanche.

On dit que bien loin par-delà les Monts d’Elwarch, une de ses soeurs est devenue si mauvaise que même les animaux n’arrivent plus à survivre à ses colères sauvages. La Forêt Sirline est munificente, Serceor, c’est avec reconnaissance que nous devons nous en rappeler. Beaucoup ont peur d’Elle, et ils ont raison. Elle a eu des éons pour couver sa vengeance. Mais Elle, ne hait pas l’homme, elle sait encore reconnaître ceux qui savent ce qu’ils lui doivent. Bien sur, elle est hostile, mais ne le serait-on pas si des milliers de nos fils avaient été fauchés pour le bien-être insignifiant des insectes que nous sommes!

Pourtant, que la Sirline demeure immense... Encore tellement grande qu’elle-même ne se souvient plus de tous ses sous-bois, de toutes ses branches et de toutes ses feuilles. Il est de Ses recoins qui n’écoutent plus leur Mère. Eux aussi sont si jeunes et encore si insoumis. Des chênes centenaires ne sont que des enfants au su de la Forêt. Ils réclament notre sève comme nous prîment leur sang. D’autres sont si anciens que la folie les a saisis et qu’une mémoire douloureuse a rendu meurtriers. Méfie toi de la Sirline, Serceor, toi qui vis en son sein.

Ne la blesse pas, respecte la. Remercie la lorsque tu prends l’un de ses fils et demande son pardon. Prie Shery’é et Skakth d’interjeter pour toi auprès d’Elle. Témoigne de ton bon vouloir à vivre en paix avec elle. Respecte les jeunes pousses et ne coupe que des arbres qui ont vécu leur vie. Ils n’y tiennent pas comme nous, pourvu que la Forêt perdure et grandisse. Pense a elle lors des rites de l’Equinoxe et aime la comme une mère. Alors, peut-être, se rappellera-t-Elle de toi, et peut-être voudra-t-Elle bien contenir ses enfants les plus impétueux. Sans cela, sois en paix avec les Dieux, Serceor, ou bientôt en les rejoignant, tu devras justifier des erreurs de ta vie."

 

Discussion avec Alberic l’Ancien, en la hutte de Serceor le Bûcheron aux abords méridionaux de la Forêt Sirline.

Peu avant son décès en l'Année du Méfar